Une attaque des bandits de l’organisation criminelle « Gran Grif » a fait au moins 54 morts à Pont Sondé, dans le département de l’Artibonite le jeudi 3 octobre 2024, selon un bilan partiel et non officiel d’organisations de la société civile. Après ce drame, plusieurs personnalités ont réagi.
Dans un message vocal publié ce vendredi 4 octobre, l’archevêque de Port-au-Prince, monseigneur Max Leroy Mésidor, a adressé une série d’interrogations au gouvernement, aux membres du Conseil présidentiel de transition (CPT) et à ceux du Conseil supérieur de la police nationale (CSPN).
« Qui veille sur la population ? Pourquoi tout ce que les gangs annoncent, ils le réalisent sans problème, à quelques rares exceptions ? Pourquoi tous ces voyages, toutes ces réunions sur la force multinationale alors que malgré la présence d’un premier contingent la situation s’est aggravée ? Qu’est-ce qu’on attend pour garantir la paix à la population? Combien d’invasions encore avant de manifester votre sensibilité pour le peuple ? Vous autres autorités, ne voyez-vous pas que vous empruntez la même voie que ceux qui vous ont précédé ? », s’est interrogé l’homme d’Église.
« Cette transition ne montre en rien qu’elle est une transition de rupture. Vous continuez à répéter les mêmes erreurs, les mêmes scandales, les mêmes problèmes, et vous manifestez la même indifférence envers la population, a tancé Max Leroy Mésidor. Le peuple n’en peut plus et crie au secours. Autorités, ouvrez vos oreilles, posez des actions car l’heure est grave », a appelé l’archevêque de Port-au-Prince, invitant les autorités du pays àʺ fermer le robinet de sangʺ.
Dans son message, Mgr Max Leroy Mésidor a fait le constat d’un pays malade et en souffrance et d’une population laissée à son sort. « Les départements de l’Ouest et de l’Artibonite, les deux plus grands départements du pays, sont plus malades. Y a-t-il un projet secret pour faire disparaitre ces zones ? Y a-t-il un plan pour anéantir le pays ? », s’est-il demandé.
Le Premier ministre Garry Conille, qui fait également office de chef du CSPN, a exprimé ʺsa plus vive indignationʺ et dit condamner ʺl’incursion violenteʺ des bandits du gang « Gran Grif » de Savien contre la localité de Pont Sondé.
C’est une attaque, d’une ʺbrutalité inqualifiableʺ visant des civils innocents qui est ʺ inacceptableʺ, a balancé le Premier ministre dans un communiqué ce vendredi. Cette attaque, selon le locataire de la Primature, exige une réponse à la fois ʺ urgente, rigoureuse et coordonnéeʺ de l’État.
« Face à cette situation dramatique, le gouvernement a immédiatement pris toutes les dispositions nécessaires pour renforcer les capacités de l’hôpital public Saint-Nicolas de Saint-Marc, où un grand nombre de blessés sont actuellement pris en charge. Des ressources logistiques et médicales supplémentaires sont mobilisées pour garantir une prise en charge rapide et optimale des victimes », a annoncé le Premier ministre, appelant à ʺl’unité nationale et à la solidarité du peuple haïtien envers les concitoyens affectés par cette vague de violenceʺ.
Par ailleurs, Garry Conille a informé que des renforts ont été déployés afin de soutenir les équipes sur le terrain, annonçant que d’autres unités spécialisées les rejoindront sous peu pour intensifier les opérations et promettant de traquer et de traduire en justice les criminels.
Le CPT a exprimé ʺ sa profonde indignationʺ face à cette situation de ʺterreur insoutenableʺ. Le Conseil dit avoir « immédiatement passé des instructions strictes aux autorités compétentes afin de rétablir l’ordre et restaurer la sécurité dans la zone affectée. Le mot d’ordre est clair: “Zéro tolérance aux forces qui terrorisent la population civile”. »
« Le CPT réitère son engagement inébranlable à éradiquer l’insécurité et permettre à la population de reprendre sa vie dans la dignité et quiétude », a fait savoir la présidence dans un communiqué.
Sur X, la représentante spéciale du secrétaire général des Nations unies et cheffe du Bureau intégré des Nations unies en Haïti, Maria Isabella Salvador, a témoigné ses sympathies aux familles, exprimant sa solidarité au peuple haïtien. « Nous devons tous soutenir les autorités dans leurs efforts de porter secours aux victimes et à leurs familles. Les auteurs de ces crimes et leurs commanditaires doivent être identifiés, arrêtés et poursuivis en justice », a indiqué le BINUH sur ledit compte.
Le Haut-Commissariat des Nations unies pour les droits de l’homme (HCDH), par le biais de son porte-parole Thameen Al-Kheetan, s’est dit ʺhorrifiéʺ par ce massacre, appelant les autorités à diligenter une enquête ʺrapide et approfondieʺ pour poursuivre ʺles présumés responsables en justiceʺ et à garantir ʺréparations aux victimes et à leurs famillesʺ.
Dans son bilan, le HCDH fait état de 70 personnes tuées, ʺdont environ 10 femmes et trois nourrissonsʺ. Cette structure rapporte 16 blessés, dont deux membres du gang, l’incendie d’au moins 45 maisons et de 34 véhicules. « Nous appelons à une augmentation de l’aide financière et logistique internationale à la Mission multinationale d’appui à la sécurité (MMAS) en Haïti », a invité le Haut-Commissariat.
En début de semaine, les gangs ont proféré des menaces contre la localité de Pont Sondé, a rappelé Bertide Horace, membre d’une organisation de la société civile artibonitienne. Selon Mme Horace, cette attaque meurtrière fait suite à la résistance de chauffeurs de Pont Sondé refusant de payer le droit de passage à un poste de péage établi à Carrefour Peille, en utilisant des voies secondaires.
Source: Lenouvelliste